Mon chien, Dieu et les Pokétrucs
Auteur | Myren Duval |
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Illustrateur | Charles Dutertre |
Editeur | Rouergue – 2018 |
Pauline a 8 ans, elle a une chambre, un chien, un sacré caractère et des Pokétrucs, tout va bien. Elle est donc très contrariée d’apprendre que ses parents vont accueillir une famille syrienne avec deux enfants. L’aînée, Zein, a le même âge qu’elle mais les débuts de la cohabitation sont difficiles. Pauline n’a plus le choix, si elle veut être tranquille, elle va devoir trouver une solution à la guerre…
Présentation générale
Les parents de Pauline vont accueillir une famille de réfugiés syriens. Cela va bousculer la vie de la fillette qui se sent « envahie » et « dépossédée » de ce qu’elle a l’habitude d’avoir.
A travers de courts chapitres à thèmes (le langage, la guerre, la vie quotidienne, Dieu, l’école….) Pauline va livrer son point de vue sur cette nouvelle vie et les découvertes qu’elle fait. Une chose est sûre : elle ne verra plus la vie de la même façon après cet épisode.
Notre analyse
Si ce thème est important et peut sembler un peu lourd, il est traité avec délicatesse au travers des yeux de Pauline. On lit donc ses émotions, ses ressentis, sa colère parfois. Pauline et Zein vont ainsi s’apprivoiser peu à peu et devenir amies.
On suit donc Pauline et Zein à l’école, à la maison, à la piscine ou dans des événements comme la mort de la grand-mère ou le rejet de la voisine. C’est une découverte mutuelle qui s’inscrit au fil des jours et fait comprendre aux fillettes que l’on ne choisit pas toujours sa vie mais que souvent on la subit.
Chaque chapitre pointe un moment de sa vie et les questions qui en découlent pour l’enfant. Loin d’être ennuyeuses, ses réactions sont empreintes de bon sens et souvent d’humour et peuvent questionner aussi les lecteurs :
Qu’est-ce qu’il fait le président du monde ?
Pourquoi on ne donne pas un pays vide à ceux qui veulent jouer à la guerre, pour qu’ils laissent les autres tranquilles ?
La seule chose bien pendant les guerres, c’est que les gens s’aident. Faudrait s’aider aussi en temps de paix.
A quoi ça sert d’être mort ?…
Si toutes ces questions complexes et parfois philosophiques peuvent être partagées avec les enfants, on évitera d’en proposer un traitement « scolaire », en l’utilisant plutôt comme une base de débats entre enfants et adultes.
On notera l’évolution des réactions de Pauline qui, dans une famille aidante, ose poser des questions et partager ses réflexions. On pourra à la fin de la lecture, se demander ce qu’elle a appris de ce séjour.
Le texte est simple, souvent émaillé de touches humoristiques mais parfois fort aussi, et même à double sens : Ce jour-là, on n’a pas parlé beaucoup toutes les deux. De toutes façons, les mots qui lui manquaient [à l’enfant syrienne], je ne les avais pas non plus.
C’est un petit livre qui respecte les enfants en leur proposant un contenu sérieux, mais qui respecte aussi les personnages en mettant en scène leurs ambigüités et en les soumettant à la réflexion du lecteur.
Les illustrations très simples, en noir et blanc, aèrent le texte et permettent une représentation des sentiments de la fillette et de son environnement.
C’est un livre qui pourrait ne pas sembler évident à aborder mais qui se révèle pourtant facile à lire car on peut le découvrir par petits morceaux, les chapitres étant très courts. Il n’est pas du tout moralisateur mais au contraire très ouvert et propice aux échanges.
Après un premier roman jeunesse remarqué, en 2014, « Emmène-moi place Tahrir », dans lequel Myren Duval propose aux lecteurs de 9/10 ans de comprendre la révolution égyptienne, elle signe avec « Mon chien, Dieu et les Pokétrucs » un nouveau petit roman destiné aux plus jeunes qui traduit son appétit de faire comprendre aux jeunes lecteurs les cultures différentes et le monde d’aujourd’hui. Elle est enseignante, a exercé au lycée français du Caire pendant dix ans et vit actuellement au Népal où elle exerce à l’école française de Katmandou.
Pour accompagner la lecture
On pourra mettre ce livre en résonance avec Suzanne aux oiseaux de Marie Tibi et Célina Guiné aux éditions Le grand jardin (2017) dans lequel une vieille dame se lie d’amitié avec un réfugié politique et va lui offrir l’espoir d’une renaissance.