Le flamant vert

Le flamant vert
Auteure

Elsa Devernois

Illustratrice

Mauréen Poignonec

Editeur

Kaléidoscope – 2024

Un jour, au bord de l’étang, arrive…un flamant vert.
– C’est qui, celui-là ?
– On ne le connait pas !
– Il est bizarre, non ? Et qu’est-ce qu’il vient faire ici ?
Les flamants roses se méfient, le nouveau venu est si différent…Réussiront ils à dépasser leurs préjugés ?

Mots-clés : différence, identité, point-de-vue

Présentation générale

Un flamant vert débarque au bord d’un étang où n’ont jamais vécu que des flamants roses. Ceux-ci ne l’accueillent pas vraiment méchamment mais avec étonnement et pas mal de circonspection. L’intrus explique qu’il a quitté son étang parce que celui-ci s’est desséché. Un réfugié climatique en somme. Les flamants roses ont du mal à croire qu’il est un flamant comme eux et que seule la couleur les différencie. Alors ils le mettent au défi de leur montrer qu’il sait faire exactement les mêmes choses qu’eux. Eh bien il va falloir que tu nous le prouves…Et le flamant vert s’exécute : oui, il sait prendre exactement les mêmes positions qu’eux. Il sait faire flop-flop-flop avec ses ailes, faire un nœud avec son cou, s’élancer comme un danseur et tenir sur une seule patte. Aucun problème. Il se prête volontiers aux tests d’identité qu’on lui réclame. Mais au bout d’un moment il commence à en avoir assez de devoir prouver qu’il est un flamant comme les autres, tout vert qu’il soit. Alors il inverse les rôles. A mon tour de voir ce que vous valez ! Il se lance alors dans une brillante démonstration de tout ce qu’il sait faire en plus et que les autres n’ont jamais pensé à essayer. Les flamants roses sont épatés, ils en réclament encore plus, ravis d’apprendre de nouvelles figures. Le copain vert est accepté et invité à dîner. Et même s’il ne mange pas la même chose que ses amis roses, ça n’a plus d’importance, le flamant vert est adoubé, et accueilli…tout différent qu’il soit finalement !

Nos commentaires

Première page : des flamants roses, méfiants, sourcils froncés, regard antipathique, leurs petits bien à l’abri sur leur tête…Ils regardent quelque chose que le lecteur ne découvre qu’à la deuxième page. C’est qui celui-là ? On ne le connait pas. Il est bizarre non ? Un flamant certes mais vert, qui de l’autre côté de leur étang leur fait coucou en souriant gentiment. Un demandeur d’asile en quelque sorte qui n’est pas de la même couleur que les autres. Mais qui est tout de même un flamant d’après lui…

Accueillir autrui. Dépasser nos préjugés. S’enrichir de nos différences. Réussir à s’intégrer. Autant de sujets très présents et déclinés de nombreuses façons dans la littérature jeunesse ces derniers temps. A juste titre. Un album de plus donc. Mais dont nous aimons les particularités. Certes il y a dans cette histoire un côté gentil et amusant qui peut sembler léger. L’intégration du flamant vert est vite scellée, les flamants roses sont rapidement convaincus et la problématique de l’intégration dans une société semble réglée d’une manière un peu facile. Mais rappelons que l’album s’adresse aux jeunes enfants et qu’un peu d’optimisme ne fera de mal à personne.

Les dessins roses et verts sont amusants, légers et dynamiques. Il y a un côté dansant assez réjouissant, entre ballet classique et battle de hip-hop… Le texte court et essentiellement constitué de dialogues sous forme de questions-réponses ajoute au rythme allègre de l’ensemble. La lecture à voix haute pourra y jouer de ses intonations. Pour notre migrant, l’enjeu va d’abord être de se faire accepter en rassurant les flamants roses. N’ayez pas peur de moi. Je suis un de vos semblables même si ma couleur vous étonne. Il se montre imbattable dans sa volonté d’intégration et d’adaptation. Mais en même temps, il n’est ni soumis ni craintif. On sent tout de suite qu’il s’assume, qu’il a du panache, qu’il est sûr de lui. Il peut faire comme les autres et même mieux. Quand il fait flop-flop-flop, il monte plus haut que ses congénères. Quand il s’agit de cacher sa tête sous son aile, il y cache même ses pattes et il s’endort plus vite que les autres. Et quand on lui demande s’il sait faire un noeud avec son cou, il en fait deux. En matière de défi, il ne la joue pas modestement. Il est toujours un peu un cran au-dessus des autres. A tel point qu’au bout d’un moment il commence à en avoir assez. Il n’a pas l’intention de se laisser abattre. Ses sourcils se froncent et de petites bouffées de colère s’élèvent au-dessus de sa tête. Il a suffisamment prouvé qui il était. Et il va inverser la situation. A mon tour de voir ce que vous valez. Il montre alors aux flamants roses toute une série de mouvements acrobatiques et de positions incroyables qui les laisse béats d’admiration et qu’il leur enseigne, le tout dans un bel enthousiasme collectif.

Les dessins du flamant vert dans toutes les positions imaginables sont pleins d’humour. On s’imagine bien tenter de les imiter avec de jeunes enfants dans une classe de maternelle pendant une séance d’expression corporelle !

Faire comme les autres pour être intégré n’est qu’une première étape qui sert à les rassurer, le lien peut alors commencer à se construire sur des points communs. Mais ce qui est intéressant dans cet album c’est qu’on n’en reste pas là. Le flamant vert a un côté trash plutôt sympathique. Il a fait des efforts pour bien démarrer. Maintenant il lui tarde de briller aux yeux des autres parce qui lui appartient en propre, ce en quoi il est singulier…tout bon flamant qu’il se veut être par ailleurs. Il est aussi lui-même, avec ses propres capacités. Il met en avant ses différences et il propose aux flamants roses de s’en enrichir, de les partager et d’en être heureux ensemble. Les flamants roses s’amusent tellement que, le soir, ils invitent leur nouvel ami à dîner.

Il est certainement un peu réducteur de ramener l’identité d’un flamant à ses comportements…mais ce n’est qu’un début ! Et ce n’est qu’un flamant… Qui dit que d’ici peu les flamants roses ne goûteront pas les légumes verts et le flamant vert une crevette ?Différence de culture. Partage des cultures. On aura peut-être un jour des flamants de plusieurs couleurs !

Au début du livre, la question était : Tu es comme nous ? Oui mais…
A la fin du livre, la réponse a évolué : Tu n’es vraiment pas comme nous, toi. Oui, t’es différent et…CARREMENT GENIAL !
Et c’est la fête !
Conclusion : Assumer ses différences, les revendiquer peut être une force. Les partager, une richesse.
Le message est d’importance.