La robe rouge de Nonna

La robe rouge de Nonna
Auteur

Michel Piquemal

Illustratrice

Justine Brax

Editeur

Albin Michel Jeunesse – 2013

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« Nonna ! Pourquoi tu chantes toujours en italien ? » demande une petite fille à sa grand mère. Nonna lui raconte alors l’histoire de la famille…Enfant, Nonna vivait en Italie. Son père, ouvrier communiste et athée, veut croire en une société plus équitable et chante souvent des chants révolutionnaires. Quand Mussolini arrive au pouvoir, en 1922, la famille devient la cible des chemises noires.
Le jour où c’est à Nonna qu’ils s’en prennent, parce qu’elle porte une robe rouge, ses parents décident d’émigrer en France…

Mots-clés : exil, domination-pouvoir, liberté

Présentation

En racontant son histoire à sa petite-fille, Nonna évoque le contexte politique de l’Italie dans les années 1920 et les raisons qui ont poussé son père à émigrer en France. Cette histoire est vue au travers des yeux de l’enfant et de l’humiliation que celle-ci a ressentie. C’est une porte ouverte pour aborder les raisons qui poussent certaines personnes à s’exiler et pour comprendre ce que représente l’abandon de son pays quand on y est contraint.

Notre analyse

Ce bel album risque de faire réagir certains parents qui peuvent l’interpréter comme un récit idéologique. Il faudra donc bien le situer dans le cadre historique du début du vingtième siècle et développer l’intérêt de sa lecture comme celui d’une actualité toujours vivante.
Michel Piquemal s’est inspiré d’une histoire vraie pour écrire le texte de cet album très fort émotionnellement. Il croise le regard de la fillette, encore dans l’insouciance de l’enfance et victime d’une humiliation dont les causes la dépassent avec les positions de ses parents : son père qui veut résister au fascisme et sa mère qui donne la priorité à la protection de sa fille en choisissant l’exil et le déracinement qui vont suivre.
Avec des mots simples mais très forts, il dénonce la cruauté des chemises noires symbolisant tout régime totalitaire et replace l’homme au cœur de ces moments douloureux. Ses propos sont appuyés par des mots italiens qui peuvent gêner les enfants mais qui sont compréhensibles facilement. De même le texte de la chanson Bella Ciao que l’on pourra faire écouter aux enfants est repris et traduit à la fin de l’album. La trame du récit est très simple et ne posera aucune difficulté de compréhension.

Les illustrations

Les illustrations de Justine Brax ne peuvent laisser indifférent. Ses dessins pleines pages aux couleurs profondes donnent sens au texte en l’universalisant : couleurs éclatantes qui donnent la joie de vivre sous le soleil, sombres pour refléter les oppositions et la montée du fascisme (les loups peuvent renvoyer à la chanson Les loups sont entrés dans Paris chanté par Serge Reggiani ou à la pièce de théâtre Le petit chaperon Uf de JC Grumberg qui donne au personnage nazi la forme d’un loup), le travail dur et la perte de l’emploi, le rouge de la fillette, provoquant l’acharnement puis les couleurs pastel du retour à la sérénité.
Beaucoup de points de vues différents donnent de la force à cet accompagnement pictural comme par exemple le zoom sur les loups (p14-15) ou la maman (p20) / la contre- plongée avec perspective fuyante écrasante sur le père travaillant (p17 et p19) ou la fillette agressée (p27) / la vue de dos pour le départ (p30-31)…

Cet album est une belle réussite qui aura néanmoins besoin d’être accompagné afin que les enfants en comprennent la véritable portée.