Le cerf-volant de Toshiro

Le cerf-volant de Toshiro
Auteur

G Roman

Illustrateur

S Nicolet

Editeur

Nathan – 2018

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Par une belle journée de printemps, Toshiro et son grand-père fabriquent un cerf-volant. Ils le lancent dans le ciel, mais le vieil homme ne peut pas le voir car son corps fatigué l’empêche de lever la tête. Toshiro a l’idée de l’installer sur un banc devant une flaque d’eau qui forme un miroir.

Mots clés : Asie, grands-parents, sagesse

Présentation

Nous allons nous appuyer sur la présentation des éditions Nathan pour présenter cet album : une histoire pleine d’émotion de deux personnages écorchés par la vie avec des illustrations épurées d’un Japon mythique.

Analyse

Les deux personnages principaux sont en effet mal adaptés à une vie ordinaire. Le grand-père est handicapé par la vieillesse. Son corps fatigué ne lui permet plus de regarder en l’air. Le garçon est mutique. Il se réjouit, s’amuse, réfléchit, agit mais ne parle pas, pour des raisons que le texte ne cherchera jamais à préciser. Et pourtant le vieil homme et son petit-fils partagent des moments merveilleux. Le cerf-volant est l’objet de leur expérience commune, le support de l’amour qu’ils se portent l’un à l’autre. Le grand-père aime voir le cerf-volant et Toshiro ne veut pas voir les yeux du vieil homme se remplir d’ « une ombre de tristesse qu’il ne connaissait pas » lorsque profiter du reflet de l’objet n’est plus possible, en raison de l’assèchement de la mare. Toshiro fait preuve d’inventivité et d’obstination pour contenter son grand-père, remplissant chaque jour la flaque avec de l’eau de l’étang. Mais quand l’hiver arrive, Toshiro ne trouve plus de solution.
Toshiro se met alors à chuchoter par nécessité, il a épuisé toutes les solutions visuelles possibles pour que son grand-père continue de profiter du spectacle. Malgré le peu de paroles prononcées de l’enfant, on comprendra le pouvoir qu’il acquiert grâce aux mots dans la mesure où, en hésitant d’abord, il « dessine » peu à peu le paysage pour le décrire à son aïeul. Le langage, dans son émergence lente, est d’abord désir de faire plaisir. La pureté de la relation entre les deux personnages est d’autant plus marquée que le grand-père ne manifeste aucune émotion excessive. Il ferme juste les yeux, savourant, semble-t-il, ce moment magique. Et il choisit de rendre cet instant banal en prenant simplement la main de l’enfant et en parlant du cerf-volant. Le mot final, le « oui » de Toshiro marque, toujours avec une simplicité presque déconcertante, tout le chemin parcouru pour acquiescer et accepter d’entrer dans le monde de la communication verbale.
Tout dans cet ouvrage est basé sur une extrême sensibilité. L’écriture poétique dit en très peu de mots tout l’amour qui unit les personnages et les émotions qui les traversent. Même si le niveau de langue est assez soutenu, le texte est court et très lisible. L’ensemble apporte un sentiment d’apaisement et de sérénité.

Les illustrations

Les illustrations sur double-page sont souvent prégnantes par rapport au texte. Elles apportent de nouvelles touches sensibles et procurent à elles seules de l’émotion.
Entre crayonnés, encre et à-plats de couleurs, les illustrations marquent un contexte asiatique emprunt de BD. Il est parfois question de descriptions très naturalistes, mais il y a également des passages avec des animations des personnages, soit directement soit  en utilisant des ombres.
Le pull jaune de Toshiro fait écho au kimono noir et blanc du grand-père et au cerf-volant rouge. Ces trois couleurs se retrouvent dans chaque page pour marquer une symbolique le plus souvent culturelle (portail japonais, une fleur, un poisson…). On notera d’ailleurs que le grand-père porte une écharpe jaune à la fin de l’ouvrage.
Le travail sur les plans donne à varier les points de vue et les approches. Parfois l’illustration permet de prendre de la hauteur ou au contraire elle invite le lecteur à se rapprocher des personnages, voire à se positionner à leurs pieds.