Le gardien de la lune
Auteure-Illustratrice | Zosienka |
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Editeur | Saltimbanque – 2020 |
Émile a été élu gardien de la lune!
Nuit après nuit, il veille sur elle, s’assurant de son confort pour lui permettre de briller, aspirant les nuages, chassant les chauves-souris…
Mais un soir, la Lune se met à rétrécir petit à petit.
Que faire?
Le Gardien de la Lune est une jolie histoire du soir, emportée par la douceur et la tendresse des mots et des illustrations de Zosienka.
Mot-clé : nuit
Présentation
Quelle douceur, quelle poésie dans ce très bel album au titre évocateur : le gardien de la lune.
Un ours blanc est fier d’être nommé « gardien de la lune ». Il prend son rôle très au sérieux. Il s’équipe, s’approche au plus près de l’astre pour s’assurer de son bien-être.
Mais inexorablement la lune suit son cycle. Elle se présente brillante et pleine le premier jour de la mission de l’ours. Puis elle décline. L’ours ne comprend pas. Il s’inquiète, tente d’agir, sans résultat.
Un oiseau de passage tente de rassurer l’ours en lui montrant que l’absence peut être suivie d’un retour. « Les choses vont et viennent. »
Après une longue attente, en effet, la lune repointe le bout de son nez en souriant, pour prendre de plus en plus de place et redevenir pleine.
De nombreux sites sur la toile proposent cet album comme un livre à lire avant le coucher. Il est vrai qu’il amène une sérénité propre à l’endormissement. Mais il nous semble que cet album peut être partagé à tout moment de la journée, pour le simple plaisir de rêver au ciel, à la lune et aux étoiles.
Quelques commentaires
Tout dans cet album prête à rêver, à imaginer. Qui sont ces créatures de la nuit? Pourquoi se réunissent-elles? Pourquoi faut-il garder la lune ? Pourquoi l’ours prend-il un filet à papillon, un bocal de lucioles et toutes ces choses bizarres pour remplir sa mission ? Inutile de chercher des réponses réalistes ou pratiques. Il s’agit juste de partir avec Emile, l’ours blanc, aux formes tout en rondeur et au regard si doux.
Emile ne cherche pas à toucher la lune ou à la prendre. Il veut juste se rapprocher d’elle pour mieux la défendre. Le gardien de la lune est avant tout un protecteur. Il est là pour le bien-être de l’astre dont il a la charge. Cet engagement moral est d’autant plus joli qu’il s’agit d’une mission personnelle dont le seul enjeu est le plaisir de contempler la lune « si belle » et « si ronde ».
Emile prend de la hauteur pour garder la lune. Il grimpe 93 marches, ce n’est pas rien ! On le voit en équilibre sur une branche d’arbre, assis sur une sorte de château d’eau, installé sur un toit. Ce besoin de s’élever enrichit la dimension poétique du récit. La question scientifique suggérée (pourquoi la lune se rétrécit-elle et disparaît-elle ?) est terre à terre mais son développement est aérien. Une planche de l’album fait état du cycle lunaire mais aucune explication ne vient alourdir le récit. Il ne s’agit pas de comprendre mais plutôt de rêver en regardant vers le haut. Rien n’interdit de se poser des questions !
Dans un premier temps, Emile fait du ménage pour veiller sur la lune. Il aspire les nuages obscurs, il époussette les chauves-souris. Et puis il discute avec elle, lui propose à manger, tente de la divertir. L’ours agit comme un adulte avec son enfant à la maison, veillant à son confort. Outre la gentillesse du personnage, son comportement est rassurant. C’est un gardien attentif et bienveillant.
Puis, l’ours s’inquiète du changement de forme de la lune. Il observe, pose des questions à son entourage. Il finit par se sentir responsable de sa disparition. C’est un oiseau, libre dans l’air, qui vient le rassurer. Sa démonstration passe par un jeu de « montré-caché ». En effet si on suit bien son vol, on le voit disparaître derrière la lune puis se poser derrière l’ours. On ne sait pas quand l’ours l’a perdu de vue. La phrase prononcée ensuite par l’oiseau est assez énigmatique « Les choses vont et viennent, tu verras ». On dépasse ici le jeu de cache-cache pour tendre vers une réflexion sur le temps et sa continuité. L’oiseau engage l’ours à se consoler en se projetant dans un futur rassurant.
Le temps d’attente développé sur plusieurs pages marque la solitude de l’ours à un moment où angoisse et impatience s’entremêlent de façon ténue (double page/ Ours assis de dos sur le toit). On peut y lire également l’espoir qui renaît (l’ours allongé et la lune qui apparaît / l’oiseau en vol et l’ascendance de la lune). La dernière double page, le baiser de l’ours à la lune, conclut l’album sur une touche de tendresse voire d’amour. Les deux personnages sont sur le même plan, ils ont quasiment la même couleur, ils forment une véritable union.
Les illustrations
L’auteure-illustratrice Zosienka dont Le gardien de la lune est le premier album nous propose d’emblée une ambiance douce et tendre qui convient parfaitement au thème développé.
L’invitation à suivre Emile au début du récit est introduite par une page intérieure de couverture très esthétique qui donne le ton : un ours blanc pacifique en action, beaucoup de douceur (le fond blanc, les bleus), du mouvement (les plumes, les feuilles), de l’énergie (le rouge), un peu de danger (les chauves-souris noires)… On pourrait croire à une espèce de papier peint décoratif qui raconte une jolie histoire de façon répétitive.
L’ours ressemble à un « barbapapa » avec des pattes et un museau. Il est en symbiose avec la lune, par ses rondeurs et par sa couleur. Ses yeux et ses postures expriment ses émotions : sa fierté, sa volonté, sa bienveillance mais aussi son inquiétude et ses interrogations. Le lecteur ressent facilement de l’empathie pour lui. On le suit quand il part à l’aventure en prenant une échelle oblique, on est content quand il lève les bras vers la lune les deux pieds bien stables sur une branche, on se sent mal à l’aise quand il croque son biscuit le regard en coin et la main sur la bouche… Sa représentation de dos lors de l’attente de la réapparition de la lune projette le lecteur dans le même temps suspendu que lui.
On observe quelques résonances entre la transformation de la lune et le quotidien de l’ours. Le cookie à peine croqué fait écho au début de la décroissance. La tranche de pastèque bien entamée ressemble à la lune en quartier. Le fil de la trajectoire du vol de l’oiseau est comme la dernière apparition de l’astre. Ces quelques suggestions enrichissent encore l’imaginaire.
La rondeur de la lune est amplifiée par des effets circulaires de blancs/jaunes à sa surface, bleu/blanc dans le ciel. Dans la double page qui montre Emile debout sur un arbre, il semble que tout tourne, sauf Emile bien équilibré sur ses pieds. Cette double page est d’ailleurs reprise pour la première de couverture. En fait le mouvement de l’astre est suggéré tout au long des pages. La lune est mobile changeante, comme les choses de la vie.
Le travail sur les plans est remarquable. Les différents placements entre Emile et la lune illustrent le cycle lunaire. Quand la lune est ronde, Emile est très proche, il la regarde en face ou il la tient dans sa main pour l’embrasser. Quand l’aspect de la lune change, il en est éloigné, il la voit en levant la tête, le regard au loin. Lors de la disparition de la lune, il ne la regarde plus. Quand elle réapparaît, il l’observe de nouveau mais il est tout petit et l’astre est énorme. Il est toujours question de mouvement. La lune bouge, Emile aussi.
La palette de couleurs est étendue. Le bleu peut prendre toutes sortes de nuances. Il est lumineux surtout quand la lune est pleine. Il est aussi profond quand Emile s’interroge. Il devient très sombre quand la lune se cache, presque noir. Parfois les bleus de la nuit avalent tout, même la couleur des feuilles des arbres. Le blanc/jaune caractérise l’ours et la lune. Quelques pages sur fond blanc sont comme une ponctuation dans la narration, en donnant un rythme de lecture. Les rouge/rosé/marron sont aussi présents, par touches ou en fond. Ils réchauffent les bleus et les verts et apportent un certain dynamisme.
Les illustrations en pleine page sont plus prégnantes que le texte. Elles pourraient presque se laisser regarder sans commentaire.
D’autres livres…
Le concept de temps, notamment de durée, se construit petit à petit chez le jeune enfant. L’absence, même de courte durée, est parfois une épreuve difficile à vivre tant l’attente semble longue. Bébé Chouettes racontent l’histoire de trois oisillons qui attendent leur mère partie chasser pendant la nuit. Ils réfléchissent selon leur maturité et tentent de se rassurer comme ils peuvent. C’est un très bel album ! |
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Un album au style est poétique. Une ambiance douce et apaisante. Une lune loquace qui raconte des histoires de la nuit… pour s’endormir. |