Tumee, l’enfant élastique
Auteure | Marion Achard |
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Editeur | Actes Sud Junior – 2020 |
« Quand j’aurai quinze ans, je partirai au Cirque du Soleil.
Sa voix était déterminée. J’ai relevé le menton.
– Moi aussi.
Arioma m’a souri.
-Très bien, on ira ensemble alors. Et on sera célèbres !
C’était un pacte.
Arioma m’avait aspirée d’un coup. Elle savait déjà où elle allait et ce qu’elle voulait. Ca semblait si simple de m’engouffrer dans ses projets. C’était simple, mais je savais déjà que ça ne voulait pas dire que ce serait facile. J’ai souri, bien heureuse de tenir cette promesse au creux de mes mains. »
Mots-clés : identité, solidarité, jeu-défi, sport
Présentation de l’éditeur
Tumee grandit dans un quartier de yourtes, en banlieue d’Oulan Bator, la capitale de la Mongolie. Depuis toute petite, elle est passionnée par la contorsion, un art qui exige de longues heures d’entraînement et de répétitions sans relâche des mêmes figures. Heureusement, à l’école de cirque, elle peut compter sur sa partenaire Arioma pour lui donner la force d’aller au bout de son rêve.
Nos commentaires
Ce roman pour lecteurs est simple et prenant. Il est structuré en courts chapitres, de deux à cinq pages, qui permettent à chacun de lire à son rythme.
D’emblée, il commence par la performance de Tumee qui essaie de battre le record de la position de Marinelli : tenir le plus longtemps possible, le corps en lévitation, avec la mâchoire comme seul appui. Durant ce temps qui s’étire et se dilue, elle va, pour oublier ses efforts, se remémorer toutes les étapes qui l’ont amenée à ce niveau d’excellence. Le déroulement de cette épreuve va être entrecoupé par ces souvenirs. Cela laisse le lecteur en attente et lui permet de comprendre ce que représente cette situation tout en se posant la question : va-t-elle y arriver ?
Ces retours en arrière nous permettent de découvrir le cadre de vie de Tumee, en Mongolie, dans une yourte, d’abord parmi des paysages de steppes où vivent des yacks, puis dans la banlieue de la capitale. Par petites touches, nous y découvrons aussi le milieu social dans lequel elle évolue, les difficultés financières de la famille, le travail difficile du père qui doit s’adapter aux aléas climatiques qui déciment son troupeau puis à des embauches précaires dans les mines. Rien n’est traité de manière misérabiliste, juste descriptive ce qui permet de comprendre la volonté de l’enfant de sortir de ce milieu pour intégrer un cirque étranger.
Tumee est portée par un père qui désire ardemment que sa fille ait une meilleure vie que lui, mais aussi par son amie Arioma qui va l’encourager, lui donner un rêve et la pousser à se dépasser. Si on saisit bien le travail intense, les heures et les mois d’entraînement à forcer son corps, les douleurs inévitables, là encore rien n’appuie sur ces sacrifices qui sont montrés seulement comme indispensables.
Le récit est alerte, bien mené, avec des rebondissements qui maintiennent l’attention du lecteur et montre en opposition de la déchéance du père, l’ascension de Tumee qui cherche toujours à aller plus loin pour réaliser son rêve mais aussi pour donner à son père une fierté qu’il est en train de perdre.
Cela donne un livre fort qui respire le vécu. En effet, l’auteure, Marion Achard, est elle-même artiste de cirque et a écrit ce roman, après un voyage de plusieurs semaines en Mongolie, à la rencontre d’enfants contorsionnistes. Elle a inséré à la fin du livre, des photos qui permettent de bien comprendre ce que sont les contorsions. Peut-être faudrait-il commencer par là avec les enfants, regarder ces témoignages qui disent bien les efforts et les attitudes à maîtriser.
Cela donne aussi une certaine « légèreté » car le travail d’artiste de cirque évite de s’interroger sur les exigences de certaines pratiques de sports de haut niveau ou sur des discours nationalistes. Le cirque permet de sortir de ce qui a été établi parce qu’il a un côté créatif par ses visées sur le spectacle et le plaisir qu’il cherche à procurer.
Notre avis
Voilà une histoire captivante qui nous transporte dans un autre univers, riche en découvertes. Le roman est porté par de beaux personnages, qui portent des valeurs fortes : la persévérance, l’amitié, l’amour, le respect de l’autre. C’est un roman qui se lit rapidement tant on est pris par les événements qui se succèdent et la force des sentiments qui y sont exprimés.
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Peu de livres « jeunesse» abordent ce pays lointain.
Sur Internet, une référence est faite à un film paru en 2017 « La jeune fille et son aigle » que Télérama qualifie de « vrai film d’aventure avec une héroïne profondément iconique et forte » avec « de très belles images et beaucoup d’émotions » qui permet de faire « un beau voyage ».
En Mongolie, le métier de dresseur d’aigles se transmet de père en fils. Aisholpan est une fille mais pas question que cela l’empêche de reprendre le flambeau. Depuis son enfance, elle assiste son père qui entraîne les aigles. Toujours avec l’aide de son père, elle décide d’adopter un aigle pour en faire un chasseur de renards. Son audace sera-t-elle acceptée par les anciens du village? Ce qu’elle veut, c’est être respectée et briser les traditions qui érigent des barrières aux jeunes filles… Présentation de Télérama |
Mise en ligne en mars 2021