Tom et moi
Auteure / Illustratrice | Nadine Brun-Cosme |
---|---|
Editeur | Editions courtes et longues – 2024 |
Présentation générale
Un garçonnet et son chien, Tom, sont amis depuis toujours. Un jour, Tom disparaît et l’enfant le cherche partout sans le retrouver. Petit à petit, il apprivoise l’absence en accumulant des morceaux de vie, souvenirs de leurs moments en commun. Mais la peur et les pleurs restent. Jusqu’au jour où Tom réapparait. Et l’enfant comprend que les souvenirs ne sont que le pâle reflet de la vie de Tom.
Nos commentaires
Ce très bel album aborde avec sensibilité des émotions fortes qu’un jeune enfant rencontre pour la première fois et qui vont lui faire découvrir des espaces personnels inconnus.
Il est construit en deux parties : la disparition du chien puis le retour de l’animal.
Tom vit avec l’enfant depuis sa naissance. C’est son double, son alter ego, son compagnon. Ils ont tout appris ensemble. Ils sont inséparables…mais Tom disparaît.
C’est la première fois que cela arrive. L’enfant le cherche de façon organisée, en parcourant les endroits où il sait que Tom aime se cacher : sous le canapé, dans la salle de bains, dans la chambre des parents, dans le jardin, dans la rue. Il revit dans chaque endroit les jeux qu’il a faits avec lui, les cache-cache, les éclaboussures du bain, la course. Il ressent combien leur amitié était une vraie complicité. Il comprend la valeur de ce qu’il a vécu avec lui. Tom, depuis toujours, c’est entre Tom et moi. Il ne veut pas réveiller ses parents, il ne veut pas aller chercher l’aide de son ami Arthur. Il veut retrouver Tom lui-même mais commence à ressentir un sentiment fort qui l’envahit et qu’il n’ose pas nommer. De petites gouttes se sont mises à couler le long de mes joues. De la sueur, je me suis forcé à penser. C’était la première fois que je me forçais à penser quelque chose de pas vrai. Et il comprend qu’il a maintenant peur que Tom ne revienne pas.
C’est alors qu’il va trouver un bout de la laisse de Tom, dans la rue, qu’il va rapporter chez lui. L’illustration le montre sur un chemin violet se dirigeant vers une lumière. Le début de l’espérance et de la reconstruction. Il va commencer à constituer un petit tas de choses qui vont lui rappeler Tom : sa balle, les feuilles d’automne, le filet du panier de basket, un caillou… Il pense qu’avec ces objets ce sont des morceaux de leur vie à deux qu’il rassemble. Il crée une espèce d’autel païen qui lui rappelle son chien. Mais même en jouant avec son ami Arthur, il n’est plus réellement présent tellement il pense à Tom. Il comprend ce qu’est la tristesse, seul, opposée à la joie de jouer avec Tom : une petite pierre dans mon ventre qui ne voulait plus sortir. Il va éprouver successivement l’absence, la perte, le temps qui s’allonge sans l’autre, le manque, les souvenirs, les traces… C’est un monde intérieur qui grandit en lui où la solitude, le froid, le manque restent omniprésents. Ce sont les étapes du deuil qui se déroulent jusqu’à son acceptation. Car, petit à petit, avec l’accompagnement de son père et la présence d’Arthur, il va commencer à redormir et à ne plus penser à Tom. A oublier…et à se tourner vers autre chose.
L’originalité de la deuxième partie commence alors avec le retour de Tom. C’est quand un aboiement tire l’enfant de sa contemplation que le chien revient. Comme le garçonnet, le lecteur n’y croit pas. Il s’est laissé embarquer dans des émotions fortes que ce texte simple sait fort bien provoquer et doute que ce soit du même chien qu’il s’agit.
L’enfant le laisse venir à lui, jusque devant le tas de souvenirs qu’il a constitué. Il se rappelle sa peur de ne jamais le revoir. Il n’ose plus bouger, il est dans un état de stupéfaction et de sentiment d’irréalité. Les retrouvailles ne sont pas simples. On peut imaginer que l’enfant en veut à l’animal de l’avoir fait souffrir. Il va falloir se ré-apprivoiser mutuellement.
C’est Tom qui revient vers lui, qui lui lèche la main, se laisse caresser et sort sa balle de l’étagère des souvenirs. Et c’est l’enfant qui réalise alors tout ce que ces objets avaient effacé : la douceur de son poil, son odeur, son regard, sa chaleur.. Tout ce qu’il n’avait pas pu garder. Tom est redevenu totalement lui-même et non plus une image tronquée. Tom, en vrai, c’est doux. Plus doux que tout ce qu’on peut essayer de se rappeler.
Les illustrations de l’autrice sont somptueuses, de grand format, parfois même sur des doubles-pages qui envahissent l’espace et vont parfois jusqu’à noyer le texte dans les couleurs. Elles naviguent entre l’effacement du chien et du monde environnant et une expressivité très forte des personnages dans des teintes éblouissantes et des aplats crus, presque brouillons. C’est lumineux, fluide, travaillé à l’estompe et au détrempage. Une complémentarité très bien réussie.
Notre avis
C’est un album magnifique avec très peu de texte mais des mots forts qui font exploser les émotions. Il montre qu’on peut arriver à oublier quelqu’un mais que ce passage est douloureux et que les souvenirs ne sont qu’une partie de la vie et des sensations.
C’est une histoire qui nécessite un accompagnement de l’adulte dans sa découverte pour aider les jeunes enfants à contrôler leurs émotions qu’ils pourront ensuite revivre plus sereinement en le feuilletant de nouveau.
Pour découvrir l’univers de l’autrice-illustratrice, le site Babelio propose une vidéo très intéressante.
Pour aller plus loin
Une belle histoire d’amitié entre un enfant et un chien, une histoire de confiance aussi.
Même si ce livre bascule dans un univers fantastique et dangereux, c’est aussi un livre d’une belle relation qui plait beaucoup aux enfants et qui véhicule également des sentiments très forts.