Nos commentaires

Mais quel est donc cet humour annoncé au vu de la couverture d’un énorme ours qui fait la tête en suivant un tout petit raton laveur qui sourit en lui parlant ? Ces deux personnages sont d’ailleurs repris sur la page de garde pour bien marteler que non, ce n’est pas une impression : le grand et gros grizzly avance menaçant vers le lecteur alors que son compagnon le regarde en s’interrogeant. Que font ensemble deux animaux si différents ? Et en quoi est-ce drôle ?
C’est donc l’objet du livre de nous mener dans leur vie pour les comprendre…et en rire !

L’album est construit par une mise en page répétitive sur deux doubles- pages successives :
Sur la première, l’ours occupe les trois quarts de l’espace, affalé sur un coussin alors que le raton laveur est acculé dans un coin en lui faisant face. Ce dernier lui propose une promenade…qui est refusée par Grizzly qui trouve cette sortie trop longue.
La deuxième montre les deux animaux durant cette balade, l’ours souriant et appréciant la sortie.
Ce schéma va se répéter quatre fois, toujours sur ce même principe : une proposition du petit, un refus argumenté du gros, qui finalement va céder puis la réalisation commune de cette idée, dans la félicité pour tous les deux.
Une fois que ces échanges, l’un propose et l’autre refuse, seront installés, cela sera un régal pour le jeune enfant de les anticiper dans la situation suivante. En effet, sa structure est inchangée, comme dans une ritournelle de conte. Tout est ensuite dans le dessin que l’on découvre : l’opposition entre le dialogue et l’action, les deux amis réunis qui sont ravis de partager un moment ensemble. Ce sont des plaisirs de savourer ces pages pleines de bien-être, de bonheur et de partage.
Et comme Raton a toujours mille idées en tête, cela ne s’arrête pas. Il enchaîne les joies que lui procure la nature au fur et à mesure qu’elles se présentent à eux : la baignade, le séchage au vent, la dégustation de mûres, la sieste, les étirements au réveil…
Jusqu’à ce que petit raton dynamique en ait assez d’être avec ce gros ronchon et le secoue un peu. La conclusion est savoureuse.

Notre avis

Qui, en tant que parent, n’a jamais connu cette situation, d’essuyer des refus successifs de ses enfants quand on leur propose d’aller « prendre l’air » pour les décoller d’un jeu, les empêcher de tourner en rond ou de s’énerver dans la maison ? On les pousse un peu, voire on les oblige à sortir et après s’être trainés derrière nous quelque temps pour bien montrer leur désaccord, ils s’investissent dans la promenade ou l’activité et rentrent, très contents de leur après-midi.

Voilà ce qui a dû inspirer Hervé Le Goff et lui donner cette idée qu’il a joliment transposée avec des animaux. Le râleur, le boudeur, le grognon, le poids mort à traîner est bien ce gros ours qu’on ne peut porter ou déplacer. Le petit vif, bavard et force de proposition devient ce petit raton laveur qui gigote dans tous les sens, a mille idées à la minute, cherche à faire plaisir à son ami et n’en a aucune reconnaissance formulée ….si ce n’est la béatitude, la gourmandise, le bien-être et la jouissance de la nature partagée. Un univers qui s’élargit et qui vivifie, éblouit et enrichit.

Les expressions que l’auteur donne à ses personnages sont incroyables : on ressent la fatigue de l’ours, on comprend son air buté, on se moque de son allure détrempée, on saisit sa peur de se piquer et on devine sa mauvaise humeur. De la même façon et toujours en opposition, il part quand même tout guilleret pour la promenade après l’avoir refusée, se laisse flotter dans l’eau avec délice après avoir dit qu’il n’aimait pas la baignade, se fait sécher au vent en se gonflant de plaisir après avoir râlé d’être tout mouillé, se goinfre des mûres qu’il refusait de goûter ou s’allonge en bâillant alors qu’il se dit pas fatigué. Les enfants apprécieront ces illustrations qui contredisent les paroles et sauront sans nul doute les décrypter comme il se doit.

Le petit raton laveur est représenté davantage dans la nuance : il précède toujours son ami comme pour lui montrer le chemin et l’inciter à le suivre. Il l’entraine, plonge avant lui, le rassure quand il est mouillé, le persuade de suivre ses conseils et souffle enfin quand il peut lui aussi se reposer. Qui peut se reconnaitre dans ces attitudes sinon les adultes?
La fin de l’histoire qui n’est en aucun cas une morale est aussi un miroir pour les parents qui, excédés par ces refus perpétuels, finissent par se fâcher car les enfants, c’est bien connu, n’aiment rien de ce qui leur est proposé….sauf bien sûr partager de bons moments tout simples avec leurs parents !

C’est un livre facile, drôle, captivant à partager avec son enfant. Une ode à l’amitié ou l’amour parental et une invitation à profiter de la nature et des moments présents.

Pour aller plus loin

Quand l’amitié est mise à l’épreuve…. deux albums sur l’amitié disponible sur notre site !

On pense évidemment à la série des albums de L’ours et l’enquiquineuse dans laquelle un ours bougon se laisse attendrir par une toute petite souris qui devient son amie.

L’album Toujours potes traite, lui, des hauts et des bas de l’amitié.