Présentation de l’éditeur

Le jour tant attendu de la sortie scolaire au zoo est arrivé ! Amadou s’émerveille et ne tient pas en place ; ses pieds ont la bougeotte, son imagination aussi ! Le voilà devant les flamants roses, en équilibre sur une jambe, puis rugissant fièrement avec les lions ou chargeant avec une harde d’éléphants. La maîtresse le rappelle à l’ordre pour qu’il se tienne sage et écoute les explications. Impossible pour Amadou, il y a tant à faire, à voir et à découvrir !
Cet album est un hymne à l’imagination. Il nous montre qu’il n’y a pas qu’une façon de voir le monde : l’imagination et la fantaisie transfigurent tout ce qui nous entoure. En témoigne la réalisation même de l’album, qui se colorise au fur et à mesure que la fantaisie, la joie et la force de l’imaginaire gagnent la classe !

Nos commentaires

Ce qui frappe au premier abord dans cet album est l’utilisation des couleurs. Amadou, le héros de l’histoire est représenté dès le début du livre avec un pull rouge et un pantalon jaune alors que tout son environnement -classe, camarades, enseignante- est gris. Une façon de le distinguer des autres puisque c’est sûr, il est un enfant différent. Amadou ne tient pas en place, il bouge, il n’écoute pas, il rêve…Il est représenté bavardant avec sa voisine, levant les bras en l’air, écartant les jambes, les lacets défaits parmi des écoliers sages et immobiles qui écoutent les conseils de leur institutrice. Serait-il un peu hyperactif ? Ou ayant des troubles de l’attention ? Il ne se contient pas, il ne sait pas attendre ou rester assis, tout le distrait.

Et la sortie de la classe au zoo a de quoi le distraire. Les animaux qui l’attendent sont, eux, tous en couleurs vives et variées, colorant d’un coup les pages de l’album : perroquets bariolés, flamants d’un rose éclatant, paon multicolore. Ce qui permet à Amadou de se glisser parmi eux et de les découvrir à sa façon, loin des commentaires de l’adulte. Lui, il découvre par le corps, par le mouvement et par l’imagination. Il se perd parmi les flamants roses en prenant avec ses bras la forme de leurs longs cous et en se mettant sur un seul pied, il s’approche tout près du lion pour rugir comme lui et son imagination l’emmène encore plus loin, dans le milieu de vie des animaux exotiques qu’il se recrée mentalement. Il abolit les barreaux des cages pour s’immerger mentalement dans le monde animal .Il a « décroché » son esprit du langage enseignant et des cartouches documentaires pour se projeter dans son univers personnel. Ce faisant il donne des couleurs au monde qu’il apprivoise et peu à peu embarque avec lui des élèves qui le rejoignent en devenant également des éléments vifs et multicolores.

La pauvre Mme Minier voit ses élèves disparaître peu à peu pour se retrouver seule, à l’intérieur, devant des gravures aussi grisâtres et ternes que son visage et sa tenue. Partant à la recherche de ses élèves, elle suit un papillon bleu qui va l’amener dans un nuage de coléoptères semblables à un arc en ciel qui lui montre le chemin de l’exploration du monde. Guidée par Amadou, dans une inversion des rôles du quotidien, l’institutrice va grimper dans l’arbre et petit à petit se colorer elle aussi. Elle écoute Amadou au lieu de lui demander de se taire, elle se suspend comme les lémuriens pour ressentir la préhension animale, elle se laisse porter dans une autre façon de découvrir le monde, moins conventionnelle mais tout aussi riche. Place à l’imagination pour devenir de vrais découvreurs, comme Amadou qui mène tout le groupe vers de nouveaux espaces en redonnant dans sa tête leur liberté à chacun des animaux présents au zoo.

Ce jeu des couleurs est magnifique et porte toute l’histoire. Le graphisme utilisé est très expressif dans les regards donnés aux animaux, les sourires des enfants montrés eux aussi dans une grande diversité mais également dans la construction des espaces qui nous font passer d’une bataille de boules de neige à une savane chaude et desséchée sans que cela ne choque le lecteur. C’est le pari réussi de l’imagination qui ne garde aucune barrière de la réalité. On notera que l’adulte est la dernière à se libérer ainsi de ses rigidités pédagogiques ou structurelles.

Ce passage de la grisaille à la couleur, du monde strict et figé à celui de la liberté est encore accentué par la place de la typographie qui se tord, s’arrondit, fait des vagues, comme si le texte se mettait lui aussi à sourire comme les enfants de l’histoire qui abandonnent l’immobilisme pour la joie et la fantaisie. Le texte, minimaliste, se réduit encore à la fin de l’histoire où les enfants n’ont plus besoin de la parole pour vivre intensément leur journée.

Notre avis

Un très bel album à feuilleter à loisir pour profiter de ses couleurs magnifiques et des multiples détails donnant vie aux animaux et aux enfants.
Une belle histoire qui peut permettre de mieux comprendre ces enfants qui sont en perpétuel mouvement, en décalage avec la réalité et souvent dans un monde intérieur extrêmement riche qu’ils ont du mal à maîtriser. Et donc une réflexion pour les adultes sur la prise en compte et la place à faire à ces enfants un peu différents.
Un grand espace laissé à l’imagination comme moteur de découvertes, de partages et de joies.

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