L’affreuse bête du Mont-la-Terreur

L’affreuse bête du Mont-la-Terreur
Auteure

Alexandre Gariabel

Illustratrice

Julie colombet

Editeur

Kaleidoscope – 2023

Si vous traversez la forêt, le champ de ronces et la rivière bouillonnante, vous parviendrez au sentier escarpé.
Là, tout en haut, trône le terrible château de Mont-la-Terreur.
Mais prenez garde, voyageurs. Il se dit qu’une bête affreuse occupe les lieux.
Pas de chance : Facteur Lapin, lui, n’a d’autre choix que d’y aller…

Mots-clés : randonnée, rumeur, peur, courage

Présentation générale

Facteur Lapin doit aller porter une lettre au château de Mont-la-Terreur. Mais il ne connaît pas cette adresse. Il va aller se renseigner auprès d’autres animaux pour savoir comment s’y rendre. Successivement, il va rencontrer le chien, ancien facteur à la retraite, le corbeau et le loup qui, tous, à la lecture de l’enveloppe s’enfuient pétris de peur. Alors Facteur Lapin suit le chemin qu’ils lui ont indiqué et arrive au terrible château qui les a tous terrorisés. Tremblant de peur, il frappe à la porte et fait la connaissance de ce propriétaire particulier tout heureux de recevoir son courrier.

Nos commentaires

Evidemment, l’histoire est un peu plus compliquée que ça …mais pas plus longue !

Dès l’ouverture de l’album, on découvre le plan du paysage dans lequel l’action va se dérouler. Du bureau de poste jusqu’au château de Mont-la-Terreur, on peut déjà savoir où l’action va se dérouler et ce parcours n’est pas des plus faciles : long, parsemé d’embûches de toutes sortes, de la forêt obscure au champ de ronces en passant par la rivière bouillonnante et le sentier escarpé. De quoi mettre le lecteur dans l’ambiance tout de suite : voilà une aventure qui s’annonce bien périlleuse !

Alors, quand on fait la connaissance du héros, un facteur-lapin tout doux que l’on aurait bien envie de prendre dans ses bras pour le caresser, on se demande comment ces deux éléments vont pouvoir s’accorder.

C’est que notre lapin est bien embêté. Il doit aller porter une lettre à une adresse inconnue. Vite il va chercher de l’aide du côté du vieux chien Roger qui à son âge doit bien connaître tous les recoins de cette contrée. L’air franchement sympathique de cet animal est plutôt rassurant. Mais la lecture de l’adresse qu’il doit décrypter le met brusquement dans un état tel qu’il panique et qu’après avoir délivré quelques bribes d’informations peu rassurantes, il disparaît, non sans avoir conseillé au facteur la plus grande prudence.

Ça y est, l’ambiance de peur et de questionnements se met en place. Facteur Lapin sait qu’il ne faut pas croiser le destinataire mais a aussi des indices pour comprendre de qui il s’agit, une bête mystérieuse, une voleuse qui ne sort que la nuit et comment il doit faire pour parvenir au château : il lui faudra traverser la forêt !
La détermination de notre facteur et son sens aigu du service ainsi qu’une curiosité non exprimée mais sous-jacente vont l’amener à continuer son voyage.

A la manière d’un conte de randonnée, il va rencontrer deux autres animaux qui vont répéter ce mécanisme de frayeur à la lecture de l’adresse mais aussi celui des indices qui vont lui permettre d’avancer peu à peu vers le destinataire recherché. Le vilain corbeau lui apprend ainsi que la bête mystérieuse se faufile dans les chambres des enfants quand ils sont endormis et qu’il va falloir passer le champ de ronces pour accéder à sa demeure. Puis le méchant loup lui indique que la bête a une longue queue, qu’elle est poilue, a des dents pointues et des pattes toutes griffues…Et qu’il faudra traverser la rivière bouillonnante pour arriver à sa destination.

A chaque rencontre la ritournelle des randonnées intervient : le lapin se répète les nouveaux détails donnés pour se questionner sur l’identité de la bête et ceux qui vont lui permettre de franchir les prochains obstacles, ainsi que la phrase qui le remet en chemin et qui est toujours la même : Facteur Lapin est postier, son métier est de distribuer le courrier.

Quand il arrive enfin devant la porte du château, alors qu’il s’apprête à déposer la lettre sous le paillasson comme lui a recommandé de le faire le chien, ancien facteur, une bourrasque de vent emporte le courrier ! Il n’a plus d’autre solution que de frapper à la porte et d’affronter la bête…

Tout au long de ce parcours, la tension monte. Les couleurs se noircissent, l’environnement devient plus inquiétant, les rencontres plus périlleuses. Les indications que notre lapin collecte dressent peu à peu un portrait effrayant de la bête et le lapin si courageux et déterminé tremble de la tête aux pieds quand il attend qu’on lui ouvre la porte du château. Le lecteur se trouvera sûrement dans la même situation et aura à la fois envie de savoir de qui on parle mais aussi peur de découvrir un monstre incroyable.

Car cette histoire aborde aussi le problème de la rumeur qui s’amplifie avec une accumulation de détails sur un protagoniste que personne n’a vu. Celle-ci circule de bouche à oreille pour discréditer « la bête » qui devient non–recommandable voire même dangereuse.

Quelle surprise alors de voir une vraie bête avec une longue queue, un corps poilu, des dents pointues et des pattes toutes griffues. Mais une bête fort sympathique à l’opposé du portrait que les animaux en avaient dressé et avec une mission aussi importante que celle du facteur…Nous ne vous dirons pas laquelle !

L’histoire se termine sur une belle amitié naissante et un apaisement qui surprendra les enfants mais les ravira en même temps ! Une belle chute très imprévue.

Notre avis

Cette histoire conviendra tout à fait à un contage avec ses rebondissements, ses animaux effrayés, le chemin périlleux et la chute finale inattendue.

L’esprit de l’autrice, plein d’humour, et les caricatures qu’elle dresse amèneront les enfants à réfléchir sur les préjugés et la rumeur en comprenant qu’il ne faut pas toujours se fier aux apparences.

Le lapin pourra apparaître un peu bête aux enfants en voulant absolument mener sa tâche à son terme dans de telles conditions mais on peut également lire dans son attitude une obstination qui honore son esprit de persévérance. De vraies valeurs.

L’illustratrice, Julie Colombet, apporte une excellente plus-value à ce texte avec ses couleurs sombres et automnales, ses lieux inquiétants découverts en tournant les pages et les expressions incroyables qu’elle donne aux différents personnages. On s’en régale.
C’est une belle réalisation qui tiendra les enfants en haleine et leur procurera des émotions fortes. Une très belle réussite.

Pour aller plus loin

Cette histoire fait inévitablement penser aux différents albums du Gruffalo, où on retrouve le même schéma de rencontres effrayantes dans la forêt.
L’album, Le wombat arrive !, paru en 2001, traite également de la rumeur