Le secret d’Ilyana

Le secret d’Ilyana
Auteur

Jean-Luc Marcastel

Editeur

Didier jeunesse – 2022

Cassandre, 13 ans, est envoyée en vacances chez sa grand-mère au fin fond du Cantal, où il n’y a ni amis, ni wifi… autant dire que son séjour s’annonce d’un ennui mortel! Sa curiosité la pousse à explorer le château du village, où une scientifique mène une drôle d’expérience sur une machine bizarre… et voilà qu’en s’approchant un peu trop près, Cassandre se retrouve propulsée en 1944 ! Elle va faire la rencontre d’une jeune juive, Ilyana, qui se cache avec son père dans le château…

Mots-clés : voyage dans le temps, amitié, mystère

Nos commentaires

Cet ouvrage, destiné aux enfants lecteurs, est un mélange de roman fantastique et historique.

Le côté fantastique fait appel d’une façon classique à la remontée dans le temps. Une scientifique fait des essais sur une machine qui devrait lui permettre de voyager dans le temps. Des références au monde quantique, à un « vortex » qui entraîne dans un autre espace et à des charges « tachyoniques » résonnent bien avec la recherche scientifique actuelle et donnent de la crédibilité à la démarche. Ce procédé est fait pour motiver le lecteur et donner des situations qui vont générer de l’inquiétude quant au retour dans le présent et la fiabilité du matériel. On y trouve aussi une histoire de « Dame Blanche » que la grand-mère de Cassandre lui raconte, personnage qui apparaît et disparaît, étrange et intrigant qui va lancer l’enquête de la fillette et être un fil rouge au fil de ses mésaventures.

Le côté historique est une véritable plongée dans la seconde guerre mondiale sur des événements précis qui sont la présence de SS dans un village et la situation de deux juifs (père et fille) qui sont cachés dans le château du village et craignent pour leur vie.

Les acteurs de ces deux versants de l’histoire sont reliés par ces allers et retours entre les deux espaces, et ce sont ces changements qui dynamisent le récit.
Il y a Cassandre, désœuvrée et isolée chez sa grand-mère, qui trouve un peu de piment à mettre dans ses vacances. C’est le modèle typique de la pré-ado curieuse, indépendante, volontaire et battante qui veut percer les secrets et trouver une explication rationnelle au fantôme dont on lui a parlé.
Cassandre va se lier d’amitié avec Ilyana, la jeune juive cachée. Celle-ci va lui révéler les épreuves qu’elle a vécues durant cette guerre : l’étoile jaune, le ghetto de Varsovie, la mort de sa sœur et la disparition de sa mère, leur fuite de Pologne et leur accueil au château. Elle est en danger et Cassandre va tout faire pour la sauver, ce qui la marquera fortement et décuplera leur amitié.

Le point de départ est un exposé que Cassandre doit faire au retour des vacances sur la Shoah et qui lui semble un sujet « vieux et pas drôle » ainsi qu’une photo que lui montre sa grand-mère quand elle était enfant, durant la guerre, avec une jeune juive cachée dans son village.
L’aventure qu’elle va vivre va complètement modifier son regard sur cette période historique et c’est avec un investissement sérieux et engagé qu’elle deviendra « passeuse de mémoire » pour « ne jamais oublier ».

Notre avis

Ce livre pose une vraie question quant à l’intérêt que peuvent avoir les jeunes sur un sujet douloureux et important qu’ils n’ont pas vécu et que plus personne ne peut leur raconter. Il y répond avec une immersion dans cette époque qui éclaire sur le contexte et les choix de cette période.

Mais comme c’est un roman pour la jeunesse, c’est rempli de rebondissements, de suspense, d’émotions et de sentiments. L’ensemble est très réussi, à la fois touchant et dynamique, très fort et bien écrit avec une construction qui instruit et éduque.

La guerre est mise en scène par des anecdotes, des événements, une réflexion sur la différence entre soldats SS et allemands, la vie sous l’occupation…Certains passages abordent clairement le sort des juifs, les dénonciations, les prises d’otages et les chantages.
L’auteur est habile dans ses changements d’espaces et de temps et tout se relie facilement, sans contradictions ou équivoques.

Les illustrations de Sophie Leullier accompagnent le récit pour aider à sa compréhension. S’ils sont expressifs et participent bien de l’ambiance créée, ils ont parfois un graphisme un peu trop inspiré des mangas japonais (particulièrement les yeux) qui les dessert un peu.
A la fin du récit, dix pages donnent des précisions sur le côté historique et scientifique. C’est un complément appréciable pour les enfants qui ne pourraient pas partager leur lecture avec des adultes.

C’est un très bon roman, intelligent et bien construit, facile à lire et très prenant auquel les enfants seront sensibles et, espérons-le, questionnés par des faits historiques véridiques.

 

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