Présentation générale

La perspective de passer les vacances d’été à rénover le chalet d’enfance de leur grand-père en Suisse ne réjouit pas vraiment les jumeaux Gabriel et Emma. Ils préfèreraient nettement s’amuser au club de voile de Genève et aller au cinéma comme les autres années, accompagnés par leur mamie. Papy Hans, ils le connaissent assez peu. Artificier de son métier, il passe normalement l’été à sillonner toutes les montagnes de la planète. Cette année, il a ce projet de rénovation auquel il a décidé d’associer les deux enfants. Mais dans cette vallée du Lötschental où ils installent leur campement près du chalet familial en ruines, accompagnés de leur petite cousine Olivia, des choses très inquiétantes ne vont pas tarder à se produire : d’étranges bruits nocturnes, l’apparition d’un monstre terrifiant, l’incendie de leur matériel et pour finir une terrible avalanche. La vallée semble maudite et une ornithologue bizarre qui confond le nom des oiseaux s’y promène, tandis que tout autour la faune et la flore de l’alpage sont inexplicablement en train de mourir. Gabriel et Emma vont mener leur enquête, accompagnés d’Olivia et de David, un garçon qui habite la montagne et qui a fini par devenir leur ami. Ils réussiront à contraindre la fausse ornithologue à avouer son plan machiavélique : elle tentait de détruire l’équilibre écologique de l’alpage à son profit, afin d’en faire fuir tout le monde et de mettre en place un improbable trafic de glaçons…

Tout est bien qui finit bien, grâce aux qualités d’enquêteurs des enfants. La coupable est piégée et arrêtée, le chalet pourra être reconstruit. Gabriel et Emma ont noué un lien très fort avec leur papy Hans. Et c’était finalement les meilleures vacances de leur vie !

Notre avis

Ce n’est pas la première fois que nous avons un coup de cœur pour un roman de Muriel Zürcher lors de nos sélections. Dernièrement, nous avions beaucoup aimé le récit de vie Des bleus au cartable. A cette occasion, l’autrice nous avait accordé une interview avec beaucoup de gentillesse.

Cette fois, avec Vacances au chalet maudit, le ton est différent. Nous sommes dans le roman d’aventure pour jeunes lecteurs, avec mystères, rebondissements, suspense et dénouement. Les adultes penseront avec nostalgie à leurs (très) anciennes lectures de la bibliothèque rose et aux fameuses enquêtes du Club des cinq ! Version contemporaine, bien évidemment…Quelque chose de classique en somme, de très bien construit et qui fonctionne à la perfection. D’autant plus que, comme d’habitude, l’écriture de Muriel Zürcher est de grande qualité, tout en restant fluide et accessible aux jeunes enfants.

Les bons ingrédients sont là : des enfants sympathiques et solidaires, une petite cousine craquante, un grand-père attachant (même si nous hésiterions peut-être à lui confier nos enfants !), un cadre magnifique, une méchante, coupable désignée, du mystère, de l’aventure…et un chien ! Il reste que ça ne suffit pas pour faire un bon livre. Il faut aussi savoir quoi faire de tout ça pour donner à l’histoire son rythme, sa richesse, son intérêt. Au-delà de ce qui soutiendra l’attention du jeune lecteur (les évènements mystérieux qui font frissonner, le suspense, l’enquête rondement menée et ses péripéties, la course-poursuite de la fin, les aveux de la coupable, un peu prévisibles et rapides pour les adultes mais certainement crédibles pour les enfants…), plusieurs thèmes importants sont traités en filigrane.

Le roman en effet nous parle d’écologie, de l’importance de préserver la nature des mauvaises intentions humaines. Muriel Zürcher connait bien le milieu de la montagne, elle en parle très bien et le texte est documenté. Son écriture nous ouvre de très beaux paysages qui font rêver mais dont elle donne à comprendre l’extrême fragilité. Le personnage de David est l’ambassadeur de cette beauté menacée, de cette fragilité à respecter et à protéger. Hostile au début du livre à l’irruption des petits citadins dans son univers naturel, il va d’abord tenter de les effrayer avec un masque de « tschäggättä », déguisement traditionnel du mois de février. Puis il va finalement devenir leur ami et s’allier avec eux pour sauver la vallée et les alpages.

Il est donc aussi question d’amitié, de solidarité et de liens familiaux forts auxquels on ne peut qu’adhérer. Gabriel et Emma, même s’ils se disputent de temps en temps sont très proches l’un de l’autre. Ils protègent l’adorable petite Olivia. Leur union fait leur force, ils apprennent qu’il ne faut jamais se décourager et qu’à plusieurs, des enfants perspicaces et courageux peuvent démasquer des adultes mal intentionnés. Au moins dans la littérature, ce qui doit être réjouissant pour un jeune lecteur ! Toutes ces scènes de jeux, de rires, d’échanges, de dangers affrontés ensemble sont portées par une écriture tonique qui rend le roman extrêmement vivant.

Ce que l’on apprend de l’histoire familiale est important aussi. Gabriel et Emma, au travers de ce chalet à reconstruire, vont se rapprocher de leur grand-père, découvrir son passé et l’histoire émouvante des drames de son enfance. Leurs liens vont se resserrer, la vie des deux enfants va s’inscrire dans ce passé familial, ils en sortiront soudés et auront gagné en maturité. Leur regard sur ce qui est important et ce qui l’est moins va se nuancer. C’est grâce à eux que papy Hans va s’autoriser à parler, à raconter. Ses petits-enfants se révèlent être de fins psychologues. Comme le dit Emma : « Les histoires de famille, faut pas les laisser moisir, faut les raconter ! » Là encore, ce sont les enfants qui viennent au secours des adultes. Tout cela est assez émouvant…

De l’écologie, de l’amitié, du lien familial, une touche de féminisme aussi, la petite Emma ne s’en laissant pas conter, et voilà l’enquête aventureuse fort bien nourrie. Vacances au chalet maudit est un roman où à aucun moment on ne s’ennuie ! Sans oublier la jolie couverture dessinée par Sébastien Pelon où déjà le mystère plane à la lumière d’une torche…

Mise en relation avec d’autres albums

Mise en ligne en novembre 2022